-Sanghren ? Mon chou, réveille-toi, il y a quelqu'un qui t'attend...
La voix sulfureuse de la démonette tira le démoniste de son sommeil. Elle se pencha vers lui, lui dévoilant un décolleté d'une profondeur intolérable. Enfin, pour un autre que lui.
-J'te prépare quelque chose à ingurgiter ?
-Ouais.
Il l'entendit s'éloigner à travers la pièce.
-Tu sais quelle heure il est, au fait ? déclara la voix lointaine de Bronia, venant de la cuisine.
Il se gratta les yeux, puis s'assit sur le bord de son lit, se massant les tempes. Quelle foutue heure il était, il n'en avait aucune idée, et il se voyait bien en train d'incinérer l'abruti qui avait osé le sortir de son lit. Mais bon, se dit-il, si Bronia ne l'avait pas attaqué... 'Devait y avoir une bonne raison. Il sourit à l'idée de la voir traîner un petit pleurnichard, puis l'emmener dans les sous-sols de sa tour pour s'amuser avec lui, jusqu'à ce qu'elle...
Un mouvement interrompit ses réflexions. Quelque part, dans la pièce une ombre avait bougé.
Il fronça les sourcils, vérifiant mentalement les sorts anti-intrusion de sa demeure, quand une forme féminine émergea d'un recoin sombre pour venir se poster devant lui. Il la reconnu instantanément, et son nom tomba comme une sentence :
-Némésys.
-Je vois que tu ne m'as pas banni de ta mémoire, dit-elle avec un air de contentement dans la voix.
-Comment le pourrai-je ?
Disant cela, il se leva, puis se dirigea vers une armoire, en sortit une bouteille et deux verres. Il se ravisa et n'en sortit finalement qu'un seul.
-Les temps changent, reprit-elle, et il faut que tout le monde soit réuni. La Grande Armée, bien sûr, mais pas seulement elle. Elle recevra le soutien des Gardes-Paix.
A l'évocation du nom de l'armée de l'Alliance, Sanghren plissa les yeux.
-Tu veux que les deux factions s'assemblent ? N'as-tu pas oublié les conséquences que cela a eu, la première fois ?
Les images de la guerre contre Archimonde lui revinrent en tête, comme les vagues s'écrasent sur les rochers. La chute de Lune-d'Argent, la destruction du Puits de Soleil avaient laissé de profondes cicatrices dans son esprit. Tout cela à cause de ces humains. Sans eux, jamais Arthas n'aurait pu savoir toute la puissance de leur source de magie. Sans ses pairs, jamais il ne serait venu. Sans eux,...
Le bruit d'un verre qui se brise le tira de sa rêverie. Sentant quelque chose goutter sur son pantalon, il baissa les yeux vers sa main, découvrant qu'il avait serré trop fort le récipient en cristal. Il la desserra lentement, contemplant les éclats enfoncés dans sa peau, lacérant ses chairs. Et puis tout ce sang... Il ne ressentait aucune douleur, pourtant.
Il sentait le regard de la prêtresse sur lui, un regard accusateur, inquisiteur. Il voyait son âme lue, fouillée par ces yeux implacables.
Il se ressaisit en secouant sa tête, laissant son sang abreuver le parquet.
-Qui a déjà été prévenu ?
Elle parut amusée par cette question si futile, sachant que de toute manière il avait cédé. Malgré tout, elle se contenta de jouer le jeu en y répondant.
-Eykolan arrive. Cynlenia et Estär réveillent le Fauchecoeur. Ynja est non loin. Les autres ne sauraient tarder.
Sanghren tiqua à l'évocation du Chevalier de la Mort.
-Raven ? Quel besoin avons-nous à réveiller cette bête ?!
Elle sourit.
-Cela... Ne te regarde pas, j'imagine. Si Elsu n'a pas jugé bon de t'en parler, il doit avoir ses raisons, n'est-ce pas ?
-C'est cela.
Puis, après quelques instants à contempler une carte des Royaumes de l'Est, il braqua son regard vert sur Némésys.
-Je viendrai.
Elle hocha la tête. L'instant d'après, elle avait disparu, aussi vite qu'elle n'était apparu, sans l'ombre d'un mouvement.
Le sorcier se laissa tomber dans un fauteuil, le regard perdu à l'endroit où Némésys avait cessé d'être. Ses pensées étaient anormalement floues, confuses. Il se sentait indécis. Lui qui pensait avoir toujours été maître de son destin... Voici que son passé se mêlait de nouveau au futur.
Le retour de Bronia le tira de son aveuglement cérébral.
-T'as le chic pour te mettre dans de ces galères, toi. Pire qu'un humain, reprit-elle après un moment à le regarder dans les yeux.
Elle s'assit sur ses genoux, se calant contre lui dans le fauteuil de cuir noir.
Il passa ses bras autour de sa taille, laissant ses doigts jouer avec le cuir de la tenue de la démone. Il aimait la sentir contre lui, blottie dans ses bras. Sa chaleur, son odeur le ravissaient.
Le sorcier l'embrassa doucement dans le cou, effleurant de ses lèvres la peau de la démone. Il la senti se cambrer sous son souffle chaud, et leurs corps entamèrent une danse sensuelle, accompagnée de caresses enflammées et de gémissements enfiévrés. Ses mains enveloppaient ses seins, comme s'il s'agissait de trésors inestimables, pour ensuite décrire de grands mouvements ardents sur son corps, et ils se consumaient de désir au rythme de leurs enlacements.
Alors, leurs mains ôtèrent, un par un, leurs habits, décuplant encore la rage qui les habitaient.
Bronia se retourna alors, sa chevelure noire dispersée sur ses épaules, et planta ses crocs dans la chair de Sanghren. Le sang coula, rouge et brûlant, sur son torse, tandis qu'elle commençait à le lécher, à l'embrasser avec la faim d'une bête affamée, en griffant son torse de ses ongles noirs. Il se prêtait à ce jeu sanglant avec délectation, lui rendant la pareille, laissant la bestialité prendre le contrôle de son esprit, et bientôt ses griffes se dévoilèrent, lacérant doucement la peau de sa compagne, et celle-ci se tordait autant de plaisir que de douleur face à tant de furieux amour.
Arrivés au paroxysme de la fusion, leurs corps se mélangèrent, et une vague de chaleur les submergea alors qu'il s'introduisait en elle, sans brutalité aucune, et ils entamèrent un va-et-vient doux, ponctué de gémissements de baisers ardents.
Ils continuèrent ainsi autant que leurs forces le leur permettaient, jouissant, puis reprenant de plus belle, comme si leurs âmes n'étaient jamais rassasiées l'une de l'autre. A un moment, il la souleva, la plaqua contre un des murs, et dévora ses seins de tout l'amour possible, tandis que celle-ci plaquait son visage contre sa poitrine, où ses tétons semblaient vouloir l'empaler de frénésie.
A un autre, elle le fit basculer sur le sol froid, où elle le chevaucha pendant une envolée dans les plus bas étages de l'Enfer. La lave sulfureuse du plaisir les noyait, les suffoquait, pendant que coulaient leurs corps échauffés dans cet océan tumultueux qu'est l'Amour.