La bataille faisait rage dehors, sous l'atmosphère rougeâtre de la planète, depuis six jours.
Six jours depuis l'arrivée des Tyranides.
A peine les premiers vaisseaux-mères arrivés, des immondices sont tombées du ciel, libérant à l'impact des nuages de spores irritants et incapacitants. Alors, une fois la planète isolée par des brouillages radars biologiques, elles sont arrivées. Si nombreuses, marées de crocs et de griffes, de chitine et de peau rouge et luisante, de tentacules et de lames osseuses... Des bêtes, vives comme l'éclair, qui semblent être mues par quelque chose de bestial, une faim insatiable...
Un impact qui fit trembler les parois de plastacier du Land Raider me tira de mes réflexions. A coté de moi, mes hommes ne bronchaient pas. Je les imaginais se remémorer les préceptes sacrés de notre chapitre, adresser mentalement des prières à l'Empereur, se préparer le cœur face aux immondices qu'ils allaient voir. Je n'avais nul besoin de les voir pour sentir la paix tranquille qui les habitait. Si je fermais les yeux, je sentirais leurs esprits, calmes comme des étangs sans remous. Je pouvais presque entendre les prières muettes qui peut-être ne sortaient pas de leurs bouches, mais allaient en tous cas directement à l'Empereur en personne...
Un sentiment de fierté naquit en mon cœur, que je refoulai bien vite. Certes, il était légitime que je sois fier en cet instant, mais l'orgueil est un des six-cents soixante-six Mots Secrets. Des Mots qui permettent aux infâmes démons de s'insinuer dans votre esprit, aussi brave soit-il.
Le techno-prêtre du char nous fit signe, puis nous nous levâmes, en silence malgré les lourdes armures de céramite qui enserraient nos corps. D'un coup, l'énorme moteur se calma, puis on entendit un tir des canons lasers latéraux se déclencher. C'était comme si milles orages se déclenchaient en même temps, déchaînant leurs éclairs en un unique point, déchirant la chair et l'acier aussi facilement que du papier.
L'écoutille extérieure s'ouvrit, nous nous engageâmes dans le sas, dans un calme quasi religieux, et les portes intérieurs se refermèrent sur le dernier membre de mon escouade, le porteur du lance-missile. Alors que l'épuration de l'air vicié s'activaient dans nos casques, la porte extérieure s'ouvrit, nous révélant une scène de cauchemar.
A nos pieds s'étendait une immense ligne de front, constituée de barricades et de carcasses de divers blindés ou bâtiments. D'un coté, des hommes, Spaces Marines de plusieurs chapitres différents, Black Templars, Dark Angels, Imperor's Fists... tous avaient répondus à l'appel de détresse de la planète. Et pour cause.
Du monde-forge, il ne restait que des ruines fumantes, où de grandes tours capillaires déchiraient le ciel, et transperçaient les nuages pour atteindre la stratosphère et les vaisseaux biologiques en orbite basse, qui produisaient continuellement des créatures abominables, assemblages génétiques de tant d'espèces assimilées par le vaisseau-ruche.
Du coté des Tyranides, l'on ne voyait que ces horreurs qui dépassaient, tant une végétation luxuriante avait poussée, cachant à nos yeux les abominations qui grouillaient sous les cimes. De temps à autres, des choses ressemblant à des serpents à griffes, et garnies de crocs, sortaient de cette canopée pour dévorer des cadavres laissés là, et se retiraient une fois le ventre plein. De longs hululements se faisaient entendre, cris abominables, raclement de griffes sur la pierre à nu.
Nous sortîmes du sas, qui se refermât rapidement derrière nous. Les chenilles blindées se mirent en route, dérapant sur le roc. Nous nous mîmes en marche, et c'est alors que je réalisai le nombre que nous étions.
Cent milles.
Contre tant de monstruosités...
C'est alors que cela me prit.
Chez les Black Templars, il existe une tradition; à l'aube de la bataille, un des Space Marines de toute la croisade reçoit des visions du passé, du présent, de l'avenir. Il revoit le combat de l'Empereur contre le parjure Horus, le Général Sanguinius tomber à ses pieds éveillant une colère et une haine sans nom en son cœur. Alors, il, va se présenter au Chapelain, qui le bénit, le berce des Litanies de la Haine, l'oint des huiles sacrées, et lui remet les deux présents les plus précieux du chapitre : L'armure de la Foi, et l'Épée Noire, qu'aucun reflet ne vient troubler la parfaite noirceur de sa lame.
Il est alors nommé Champion de l'Empereur, et se doit d'arpenter le champ de bataille, et de défier tous les généraux adverses assez téméraires pour se montrer, ou simplement croiser sa route.
J'eus ces visions.
C'est alors que je retrouvai debout dans les ruines de la chapelle du monde-forge, entouré de technos-prêtres, de Chapelains, de serviteurs dévoués. J'étais nus face à eux, ne distinguant pas leur visage profondément enfoncé sous leurs capuches rouges. Je sentis que l'ont me planta les câbles reliant ma moelle épinière à l'armure, que l'on scellait cette dernière sur mon corps, et que seuls eux pourraient me l'arracher. Je mis le heaume, et on me remit l'Épée. Une foi profonde s'éveilla en moi lorsque mes doigts se refermèrent sur sa garde.
Un Fanatisme sans bornes étreignit alors mon corps, et c'est avec la plus grande des ferveurs que je dictait à mes hommes, ceux qui avaient jurés de poursuivre les ennemis de l'Empereur jusque dans leurs tanières, les commandements qu'ils avaient pour la plupart maintes fois entendus.
Un chant monta de derrière les lignes humaines. Un chant lourd, grave, fort. J'étais à la tête de ce curieux cortège, entouré par des Serviteurs rependant encens et fumées, psalmodiant avec eux les Vœux que j'avais fait.
Alors que je m'agenouillai, et plantai mon arme dans le sol, les mains posées sur la garde, j'entendis tous les guerriers Blacks Templars, suivis par leurs homologues Space Marines, faire de même, un silence de plomb se posa sur nous. Une légère brise, témoin des combats du passé, se leva, et accompagna notre chant.
« Ô Empereur... Notre colère loue
Tes guerres sanglantes, sauvages
Et sans pitié.
Et dont les échos
Font trembler les fondations
Des plus hautes murailles.
Ô Toi, conquérant de l'Humanité,
Délecte-Toi du rugissement
Des combats. »
Le ton du chant s'amplifia, devenant une sorte de mélodie brute, sauvage, dure.
« Réjouis-Toi à la vue des épées
Et des poings rougis par le sang
De Tes ennemis,
Et du son macabre de la bataille !
Exalte-Toi dans l'affrontement
Sans merci ! »
Je me levai, extirpant la Lame de la terre. Le chant était devenu puissant, rauque et lourd. J'entendis le vacarme de cent milles hommes caparaçonnés faire le même geste que moi, et je m'élançai, suivis de près par Ceux qui ne connaissent pas la Peur.
« Et dans la joie sans vengeance.
Qu'elles glorifient la Douleur,
POUR ENDURCIR LE COEUR DES HOMMES !
Ecrasez leurs espoirs, leurs rêves,
Et faites de leurs chants
DES PLEURS DE DOULEUR !
MORT, GUERRE ET SANG !
SERVEZ L'EMPEREUR DANS LA VENGEANCE...
POUR DOOOOOOOOORN ! »
Mar 31 Mar - 23:54
